« Bonjour à toutes, bonjour à tous. J’espère que vous allez bien. Avant de parler de vous, je vais me présenter en quelques mots. Je m’appelle Marie, et je fais parti des MMI première année. Outre mes études, je suis passionnée d’entomologie. Entendez par là que j’adore chercher la petite bête. Et oui, je suis une amoureuse des insectes. Bien. Maintenant que les présentations sont faîtes, vous devez sûrement vous demander la raison de votre présence ici. Et bien, vous, chers collègues, chers amis, chers professeurs, avez un point commun avec ces insectes. En effet, depuis quelques mois déjà, je vous ai tous sélectionné, un par un, dans le but de réaliser un projet inédit. Vous serez à l’affiche d’une première mondiale. Un musée d’humains empaillés.
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L’idée m’est apparue il y a quelques mois déjà. Samedi 3 novembre 2018. Je suis l’heureuse nouvelle locataire d’un magnifique T2, à 2336 pas de l’IUT. Le lendemain, je rencontre Pierre, mon nouveau voisin. qui m’apprend que les anciens locataires sont partis à cause d’une invasion de nuisibles. Des blattes, des punaises de lit, mon nouveau chez moi était en réalité un parc de jeu pour petits hexapodes. Ma première réaction : la panique. Mais, mes parents m’ont toujours appris que l’important n’est pas de tomber mais de savoir se relever. Alors, j’ai réfléchi. Pendant de longues heures, assise au milieu de mes cafards, j’ai réfléchi. En les observant, j’ai remarqué la beauté de leur corps. Saviez-vous qu’ils ont des ailes ? Je crois que c’est à cet instant précis que j’ai découvert en moi un fanatisme pour ces petits animaux. J’ai donc décidé de vivre en collocation avec toutes ces petites pattes et ces beaux yeux. Et puis, une nuit, alors que les punaises me chatouillaient le dos, une idée m’est venue. Si, de ma colonie d’insectes, j’en faisais une collection ? Et si, cette collection, je l’exposais dans un musée ? De mes compagnons, ils deviendraient de véritables chefs-d’oeuvres. Un par un, je les ai transformé en pièce de mon futur musée. C’est en m’attelant à Louis, un de mes meilleurs cafards, que le coup de génie me frappa la nuque. Si empailler des petits insectes me procure un tel bonheur, qu’en serait-il d’humains ? Mon idée était de trouver 200 personnes selon des critères précis, autant dire, mission impossible. Mais, le lendemain matin, assise sur ma chaise, perdue devant mon packet tracer, j’ai eu une révélation. J’étais entourée de belles personnes. A gauche, Julie De Mendonça, et sa chevelure à n’en plus finir. A droite, Vanina Idiart, et ses beaux yeux couleur cafard. Dans la rangée lointaine, j’entrevois le beau sourire de Théo Capitaine. C’est décidé, pour ma nouvelle collection j’opte pour mes camarades de première année.
Voilà mon premier critère, la nouveauté et l’innovation. Les MMI première année, c’est avant tout une cinquantaine de corps, des physiques atypiques, des personnalités qui s’y reflètent, toute la richesse du monde dans une seule promotion. Chaque jour, j’ai appris à les connaître, et je les ai apprivoisés. Dans un seul but. Faire ressortir leur particularité. Toi, Antoine Aupy, ton sourire fera rayonner mon musée. A tes côtés, je mettrai le plus stylé d’entre nous, ton homonyme dont je terrai le nom imprononçable. Pas loin, se trouvera Tracy, élément phare de mon musée, qui guidera cet équipage tel le commandant Cousteau à bord de sa Calypso. Et puis, évidemment, Mathis Vincendeau, mon duo, que dis-je mon binôme, qui représentera fièrement cette classe, dans un costume Spider-Man.
Mais, je voulais voir plus grand. 50, c’est trop peu pour un musée d’un tel génie. Alors, j’ai cherché, et encore cherché. Et puis, un jour, j’ai assisté à une sorte de débat présidentiel, entre 3 partis assez étranges. C’est là, que j’ai compris que MMI rend les gens fous. Donc, en parlant de fous, vous, deuxièmes années, doyens MMI, aurez tout autant votre place. Pour rassurer tout le monde, j’ai fait de nombreuses recherches sur la taxidermie humaine. Et figurez-vous que la tâche n’est pas si compliquée. Premièrement, le dépouillage, j’enlèverai votre peau en vous incisant par le ventre, les mains et les pieds. Deuxièmement, le tannage. Assez facile, il suffit d’assouplir la peau, et de la protéger contre les maladies. Vous voyez, je prendrai bien soin de chacun d’entre vous. Ensuite, le mannequin. Je vous donnerai la forme la plus adéquate possible. Enfin, le montage, où j’assemblerai votre peau à votre mannequin. Et voilà, vous êtes dans mon musée.
Pour finir, j’avais envie de plus d’exotisme, d’une touche cosmopolite. Alors, je me suis baladée au deuxième étage. Et là, j’y ai observé une filière étonnante. Leur salle est couverte de post-its plus bizarres les uns des autres. Il y a une boite à idée. Une boite à idée ? Au XXIème siècle, à l’époque des ordis, de messenger, drive et Trello ? C’est là que je me suis rendu compte que vous, premières et deuxièmes années de publicité, serez la cerise sur le gâteau, la tour eiffel de Las Vegas, et plus encore, le bohemian rhapsody de A night at the Opera.
Mais Marie, ils sont tous très jeunes dans ton musée, c’est pas très vendeur tout ça. Ne vous inquiétez pas, j’ai pensée à tout. Comme dans tout musée, j’aurai ma section dinosaures. Elle sera constituée de vous, chers professeurs qui en avez vu passer, des … années. Et puis, je ne vous oublie pas, les licences pro, pas tout à fait dinosaures, mais pas très frais non plus.
Je suis très fière de vous avoir enfin dévoilé mon grand projet. Certains étaient au courant, j’ai d’ailleurs dû les séquestrer, j’en suis désolée. Les autres, j’espère que l’idée vous plait, même si vous n’avez pas vraiment le choix. Bien entendu, vos familles auront des pass VIP à vie, pour venir vous rendre visite. Quant à moi, je remercie mes parents, sans qui ce rêve n’aurait pas pu se réaliser, et sans qui vous ne seriez pas devenus de futurs chefs-d’oeuvres. Alors, souriez, vous êtes exposés. »
Concours d’éloquence, demi-finale, MMI Bordeaux 2020.