Un jour ou l’autre, on va tous mourir. Mais c’est pas la mort qui fait le plus peur, qui fait le plus mal. C’est de voir son entourage, ses proches, ses amis partir. « La vie c’est une série d’imprévus, la mort en fait partie. On ne sait pas quand on va mourir, dans quelles conditions. On ne sait pas qui parti- ra le premier, et c’est dur de voir ses proches partir au fur et à mesure. » nous confie Juliette. Face à la mort d’un proche, il est difficile d’avancer sans difficulté, de reprendre sa vie, comme avant. Juliette, 19 ans, a perdu un être cher il y a deux mois. Tout comme son papi, 59 millions de personnes meurent chaque année dans le monde. Pour connaître ce chiffre, je suis allée sur un site internet https://www.planetoscope.com, cela nous indique le nombre de décès depuis janvier 2016 dans le monde, il ne cessait de croître mais à la seconde où j’ai écrit cette phrase il y avait 10 943 355 personnes décédées. Cela nous indique égale- ment le nombre de morts dès lors où l’on ouvre la page : je me suis arrêtée à 1 715 décès après seulement cinq minutes de connexion, plutôt terrifiant.
Tous les psychologues sont formels. Pour parvenir à faire son deuil et pouvoir un jour être de nouveau heureux, il y a quelques étapes par lesquelles il est systématique que les survivants, ceux qui voient leur entourage s’effriter, passent. D’abord, il y a le déni. « Lorsque j’ai appris qu’il n’était plus là, j’ai ressenti comme un coup de couteau que l’on me plantait lentement dans la poitrine. Puis mon souffle s’est coupé, l’apesanteur avait tout son effet sur moi, je suis tombée au sol et n’arrivais plus à me relever. Ensuite, les sanglots vous emprisonnent, et là, vous n’êtes plus vous-même, vous êtes emparé par la folie. J’ai poussé des cris, et je me répétais cette phrase « c’est pas possible, je ne peux pas le croire ». Tout le monde se croit immortel. Dans ma tête je ne vois que des vies qui se croisent, mais jamais on se dit que tout peut s’arrêter. Ou on ne le croit pas. Là, c’était pareil, je ne le croyais pas. Dans ces moments, il est impossible de rester fort, d’être courageux, c’est pourtant la seule chose qu’on pense à dire pour consoler ceux qui sont en deuil. On s’enferme alors comme une coquille d’huitre qu’il est impossible d’ouvrir. Sans aucune haine, (parce que dans ces moments, le choc émotionnel est trop important, plus rien ne peut nous atteindre) j’en voulais à la Terre entière, à ceux qui étaient inconscients de la chance de profiter de la vie alors que je les voyaient râler dans leur voiture, à
ceux qui vivaient tout simplement, et puis surtout, je m’en voulais d’être encore là. Encore aujourd’hui, je n’arrive pas à y croire, je me dis qu’il va revenir, que je vais le revoir. Mais ça, il parait que c’est normal, c’est juste que les souvenirs et l’amour porté à quelqu’un ne s’en vont pas avec lui, et heureusement. »
Après le déni, survient la colère. C’est le cas de Tom, 20 ans, qui à l’âge de 17 ans a perdu sa cousine. « Dans ma chambre, j’ai un mur qui porte encore les traces de chaque os de ma main lorsque j’ai donné un coup de poing après avoir appris qu’elle était injustement partie. Le sang monte au cerveau, on est pris par un démon, on en veut à la vie, au monde entier. » Ensuite, l’imagination prend le dessus : on regrette le passé et on le ré-invente. « Je regrette tellement de choses. C’est dans la nature humaine d’être continuellement insatisfait. Mais lorsque quelqu’un meurt il est impossible de revenir en arrière. Et moi, je m’en veux. Je m’en veux et me dit que tout aurait pu être différent si j’avais osé faire certaines choses. » confie Juliette.
La dépression, est LA phase que tout le monde appréhende, et qui est très difficile à gérer. « Je ne voulais plus voir personne. Je refusais de vivre. Comme si je n’avais plus le droit, je ne m’interdisais tout loisir, de manger, ou de rire. Seul le néant, le vide, le rien m’assoupissait. C’est comme si moi aussi j’étais morte, mais en respirant. Et puis on s’en sort, petit à petit, grâce à la médecine, et surtout grâce à ceux qui restent. » poursuit-elle. « Aujourd’hui, je me laisse le droit de vivre. Pas parce que j’en ai envie, mais parce que je sais que de là où il est, c’est ce qu’il aurait voulu. Si je peux donner un conseil : c’est de ne pas avoir peur de ne plus être seul dans sa tête, et d’assumer que la personne qui disparait de notre vie s’immisce dans notre cerveau, nous aide à prendre des décisions, à être plus sage, ou le contraire. On se sent moins seul, et on se raccroche à l’espoir. L’espoir que la réincarnation, la vie après la mort, ou les esprits existent, car ça signifierait qu’il aurait la possibilité d’être avec moi, et de vivre encore mais en étant impuissant, ou seulement vivant à travers moi. C’est aussi une des raisons pour laquelle je suis triste, c’est pas uniquement une rai- son égoïste qui est qu’il ne me verra plus évoluer, c’est surtout parce qu’il n’est plus la pour voir la vie. »
Aujourd’hui, Tom a accepté le décès de sa cousine. « On n’a pas le choix, on doit avancer et puis c’est tout. » Chaque personne est confrontée dans sa vie à perdre quelqu’un de plus ou moins cher. Des centaines de vies volées au Bataclan au décès de son enfant, le départ de quelqu’un nous touche : c’est inévitable. Chaque deuil est unique, et la vie après la mort d’un proche reste difficile mais non impossible.